Encore et toujours moi •(NEEL)

La journée aurait pu mieux commencer, elle aurait pu aussi être pire. Levé aux aurores, Neel avait maintenant pris l’habitude de consulter son courrier quand il s’ennuyait. Et son courrier bien évidemment, ce n’était pas que des factures, il y avait aussi des lettres de fans. Et quelles lettres. Elles étaient pour les trois-quarts, les mêmes. Elles s’extasiaient, pour bon nombre d’entre elles, il s’agissait de jeunes filles en manque d’amour, d’autres étaient des poèmes, et c’était toujours intéressant d’en lire quelques unes, bien qu’il préfèrerait cibler un autre public que les jeunes ados pré pubères. Il n’y répondait pas. C’était interdit. Proscrit. Elles n’étaient que des liaisons dangereuses, on ne savait jamais sur qui tomber. Son père s’en souvenait encore…Et lui aussi. Un soir de concert, Monsieur Lincoln était sorti avec un petit garçon qui était son fils, Neel. Les petits doigts dans sa bouche, il semblait apeuré par tous ces cris, et son père ne semblait pas être capable de signer des autographes avec un bambin dans les bras. Il le posa à terre, le temps de signer quelques autographes, et puis il chercha son enfant. Il n’était plus là. Neel n’était pas un bébé qui pleurait beaucoup, mais pas non plus le genre de petit garçon à s’éloigner. Il avait disparu. Affolé, son père se mit à l’appeler, jusqu’à ce qu’une jeune femme arrive avec le petit garçon dans les bras. Sa mère. Le pauvre garçon avait été traumatisé par les cris. Voilà pourquoi lors des séances d’autographes, et que des gamins étaient là, il ne les quittait pas des yeux, quitte à rater sa signature.

Perdu dans ses pensées buvant son café, il constata que son téléphone venait de sonner, et qu’il avait même un message. Il ne connaissait pas le numéro, alors il écouta le message, car sinon il filtrait. Neel était plutôt contradictoire. Sa messagerie était à l’image du garçon : folle. Il s’était amusé à coller des morceaux de discussions entre eux pour faire une messagerie, ce qui donnait un hurlement sur le NEEL digne d’une groupie dont il ne connaissait même pas le nom mais qu’il avait adoré enregistrer, et sur le Lincoln c’était un passage de Prison Break. Pour le reste ça restait varié également, et ça finissait sur un petit morceau de guitare. Il n’avait ni portable professionnel, ni personnel, c’était le même pour tous, bien qu’il fasse croire à des milliers de gens qu’il séparait les deux. Il filtrait les appels et ça s’arrêtait là. Le message le crispa. Encore elle ?! Comment avait-elle pu avoir son numéro ? Levant les yeux au ciel, il raccrocha, et ne la rappelait encore pas. Elle qui c’était ? Une groupie, qui avait gagné un concours, et pour voir si Athenaïs était touchée par son petit numéro, il s’était amusé à faire croire qu’il avait couché avec la jeune fanatique du nom de Julst Llovei, mais en réalité il ne s’était rien passé. Vexée par tout ce petit tour de passe-passe, la jeune femme s’empressa de le faire chanter pour faire éclater un scandale en racontant qu’il était un menteur aux yeux de tous, et pire qu’il l’avait violé. Mais oui, il ne l’avait pas touché ! On allait le prendre pour un Michael Jackson en puissance, alors que comme lui, il n’avait rien fait.

Au diable la petite groupie. Il se devait d’aller manger au Beijing’s Mysteries avec une personne pour discuter affaires. Et quand je dis affaires, il s’agit d’affaires qui ne regardent ni le groupe, ni les journaux, mais plutôt d’affaires familiales. Personne n’était censé être au courant, et pourtant, lorsqu’il arriva en taxi devant le fameux restaurant, les journalistes se bousculèrent pour essayer de lui poser des questions. Les yeux cachés derrière de belles lunettes – surement Ray-ban – il eut la chance que son téléphone sonne à ce moment là. Décrochant sans savoir qui c’était, il avança en écoutant. Merde. Encore la groupie. Rentrant dans le restaurant, il se contenta de répondre :

« Va voir au Candy Shop si j’y suis. »

Et il raccrocha. Manque de pot, il ne savait même pas qu’elle se trouvait juste devant le restaurant où il venait de rentrer. Ou peut être même qu’elle était déjà derrière lui. Vous savez, le problème de la célébrité reste que vous n’êtes jamais seul partout où vous allez…Qui plus est, il venait de recevoir un message…RDV annulé. Ce qui voulait dire qu’il devait affronter la furie en action.

Neel fit volte-face. Il constata avec désespoir qu’elle ne le lâcherait jamais. N’était-ce pas suffisant de savoir qu’elle faisait l’objet d’une rumeur ? Non il fallait que cette rumeur soit vérifiée pour la satisfaire. Or, il ne voyait tout simplement pas pourquoi il s’amuserait à coucher avec elle, alors qu’il n’en avait tout simplement pas envie, bien qu’elle soit très attirante. S’il avait raconté tout ça, c’était uniquement pour son besoin personnel, pour tester quelques réactions au sein du groupe. Mais non, c’était limite si on l’avait écouté. Surtout qu’Holly était une amie de cette petite peste qui s’amusait à présent à le faire chanter. La dédaignant du regard, c’était à peine s’il la calculait, et il la reprit tout de suite :

« Mr Lincoln serait plus approprié. On n’est pas potes. »

Les phrases s’enchainaient pour Julst, et elles en devenaient plus que soulantes, mais la dernière restait le comble. Arquant un sourcil, comme subjugué par son culot, il répéta :

« Au resto ?! »

Pire elle se justifiait. Jetant un regard vers la porte, où s’activait ses gardes du corps et la sécurité, elle l’importunait c’était sur, mais à y réfléchir, la renvoyer au milieu de cette jungle ferait qu’elle se vengerait. Et puis, il n’avait plus rien à faire de la journée, vu que son rendez-vous avait été annulé. Jetant un coup d’œil à sa montre, il releva la tête et lui fit signe de venir, puisqu’il avait réservé, il n’allait pas s’en priver. Mais avant cela, il se rapprocha de son garde du corps et il lui murmura à l’oreille :

« Je compte sur toi pour ne laisser entrer personne, ou je devrais encore me justifier. »

Son garde du corps acquiesçant, il se rendit aux côtés de Julst à la table qu’on leur indiquait, sans un mot, tandis qu’elle débitait plus de paroles qu’une cascade d’eau.

Il avait parfaitement entendu tout ce qu’elle avait dit, mais il ne lui répondait pas, consultant plutôt le menu. Oui, Neel avait la sainte habitude de se croire au dessus de tout : éducation Lincoln. Mais coupant sa lecture, sans pour autant lever le nez de la carte, il répliqua soudainement après de longues minutes sans ouvrir la bouche:

« Si on te demande tu diras que tu sais pas. »

Ca avait une nouvelle fois le mérite d’être clair. Bien entendu, il n’allait pas lui expliquer qu’il était fou amoureux de la belle Olivers, membre du groupe, mais qu’il se contentait de parties de jambes en l’air de temps à autres, faisant comme si de rien était, alors qu’elle était plus qu’une obsession. Il n’allait pas non plus dire que tout ceci n’était qu’un plan débile pour voir s’il se devait de dire la vérité à Athenaïs, ou s’il ne devait au contraire, pas prendre de risque pour ne pas perdre l’amitié de la jeune femme, qui valait tout l’or du monde. Non, il n’aimait pas étaler sa vie privée, et il n’allait pas demander à une groupie de jouer les psychologues en herbe, il n’avait besoin de personne.

« Au fait…Comment t’arrives à te blairer Holly ? Je pensais que Daniel était surhumain pour la supporter au quotidien, et qu’Athenaïs était une sainte… Enfin laisse tomber. Tu prends quoi ? »

Il était en train de se poser des questions, tout en fixant la jeune Llovei. Si elle tenait tellement à coucher avec lui, pourquoi ne le ferait-il pas ? Après tout, qui croirait une fanatique en chaleur ? Et puis, il serait enfin débarrassé de tout chantage…Il y avait tellement d’avantages…

« Tu aimes prendre des risques ? »

Question toute simple, mais qui pouvait dire tellement de choses à la fois. Neel laissa échapper un sourire, il était plus que malicieux, et il fallait s’en méfier. Quelle star n’avait elle pas déjà couché avec une/un de ses fans ? Lui débutait dans la matière, mais ça pourrait être une bonne première expérience et essayer de lui sortir Athenaïs de la tête, à moins qu’au contraire ça le fasse culpabiliser…

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