Est-ce que tu seras en bas, est-ce que tu me rattraperas - Neel&Eileen

Gris. Il faisait gris dans les rues de Londres. Sombre. Comme Eileen. A l'effigie de sa personne, de son humeur. En même temps, il ne faisait jamais très beau à Londres, et tout ne faisait référence qu'à la déprime. Il pleuvait. En plus du gris, en plus de ces nuages d'une couleur terne, en plus de tout cela, il pleuvait. Les gouttes ruisselaient sur le front de Eileen, se confondant peu à peu avec ses larmes. Elle se permettait toujours de pleurer, de se laisser alors lorsque la pluie se mêlait à sa tristesse. La discrétion. Elle se montrait toujours discrète par rapport à tout ça, à ce putain de drame qui avait niqué l'avenir d'un groupe. Un coup de poignard. Profond et douloureux. Coincé entre deux côtes. Personne ne devait savoir ce qu'elle endurait. Personne. Mais peut-être que tout était écrit sur son front, peut-être qu'au final, son talent de comédienne ne valait rien... Peut-être. Peut-être que ci, peut-être que ca... Minable. Déambulant dans les rues bondées de monde, Eileen se trouvait minable. Parce qu'elle n'arrivait plus à rien, qu'elle se laissait certainement autant sombrer que les autres bien qu'elle ne l'acceptât pas. Les personnes qui animaient la rue en ce moment souriaient. Ils montraient des silhouettes pleines d'entrain, des mines joyeuses. Ils remerciaient certainement la vie de les gâter autant. Les chanceux. Eileen, elle; dépérissait un peu plus à chaque instant, chaque instant la séparant un peu plus de celui qui manquait désormais à ses jours, à sa vie. Elle perdait le contrôle qu'elle avait toujours eu sur sa vie, sur son existence. Peu à peu, ses ambitions se révélaient être fausses, ou bien elles avaient changé. Mais n'était-ce pas souvent le cas lorsque la mort frappait à votre porte emportant sous son bras un être cher ? Bien sûr que si. Eileen n'avait plus aucune ambition, puisque tout n'était qu'éphémère, elle avait au moins compris ça. Et elle l'avait extrêmement bien compris.

Ses écouteurs sur les oreilles, le volume à fond, notre Belle faisait abstraction de tout ce qui l'entourait. La joie des autres lui donnait seulement envie de se cacher pour gerber, bien qu'elle fût tout de même soulagée que le bonheur opère sur certaines personnes. Vite, je tombe. Est-ce que tu me regarderas, est-ce que tu seras en bas pour m'emmener là où je ne sais pas ? Là où je ne vais pas... Alors vite, je tombe, comme un pantin sans fil, trop libre et trop fragile. Je cherche ta main dans les nuages pour chasser son image... Coïncidence dramatique, cruelle et douloureuse. Putain de chanson à la con. Le refrain de "J'te mentirais", chanson connue de Patrick Bruel venait de se faire entendre, ne faisant que renforcer le flot de larmes qui dévastaient peu à peu ses joues déjà bien rougies. Enfin. Elle y était. Elle s'engouffra sans réfléchir à l'intérieur du Oldsons Bar, bar ayant la réputation d'être peu envahi. Fort heureusement, me direz-vous. Une fois à l'intérieur, elle se braqua de nouveau afin d'empêcher ses larmes de sortir de son corps. Pas en public, évidement. Forte. Elle ressortait son vieux costume de fille au cœur de pierre. Mais elle n'était pas d'humeur... Puis ses joues la trahissaient certainement pas mal. « Un chocolat chaud, s'il vous plait », demanda Eileen au barman tout en s'asseyant sur une des nombreuses banquettes. Ce lui lui rappelait bien des souvenirs avec Neel, un membre d'un groupe rival. Membre qui avait compté parmi ses plus proches amis, il y a de là quelques semaines...

[minaaaaaaaaaaaaaaaaable ]

La pluie était si agréable. Neel avait passé le plus clair de son enfance sous la pluie. Sauter dans les flaques à pieds joints, dansant et chantonnant sous la pluie, ça avait toujours été son truc favori. Les gouttes d’eau dans ses cheveux, ruisselant sur son trench qui n’était pas vraiment adapté pour la pluie, il marchait les mains dans les poches, sans parapluie, vous ne le verrez que très rarement un parapluie à la main, il préférait être trempé et passer des heures et des heures sous la pluie. La pluie ça lui permettait de se concentrer essentiellement sur lui-même, de penser à ce que l’avenir lui réservait, à lui et aux Fun Factory, groupe dans lequel il mettait toute son énergie, tellement qu’il ne vivait que pour cela, et que ses parents se morfondaient à l’idée qu’il ne trouve pas de femme avec qui faire sa vie, lui qui avait déjà 25 ans. Il l’avait trouvée, évidemment, restait à savoir s’il fallait qu’elle soit au courant ou non. De toute manière, Neel ne voulait pas faire comme ses parents, il était tellement différent. Il avait souvent besoin de faire le point sur ce qui avait été accompli depuis, il avait tellement avancé, mais il n’avait rien d’indépendant, lui qui pourtant était si secret, si mystérieux, si réservé, il avait constamment besoin de ses repères, de ses appuis, tout le contraire de ce qu’il était en train de faire : marcher à l’aveugle. Prendre des risques, oui mais mesurer l’ampleur de ces risques, il y allait donc doucement, mais surement. Et puis, il ne pouvait foncer tête baissée, car il ne supportait pas les critiques qui allaient à son encontre. Comme celles de profiter de la mort d’un membre des Maniacs pour faire une ascension, une percée dans le monde de la musique. C’était faux bien entendu, il n’y était pour rien dans tout ça, ils perçaient au mauvais moment, et ils n’allaient pas s’arrêter pour ça, puisque ça ne les touchait en aucun cas. Justement s’ils compatissaient, ils ruinaient leur propre carrière, or ils avaient tout de même besoin de ça pour vivre.

Libre comme l’air, il n’était pas en accord avec son esprit. Ces derniers temps il ne pensait plus beaucoup au monde qui l’entourait, il était obsédé par une seule et unique personne et il en venait à s’en rendre malade, il en perdait la tête. Marchant seul dans la rue, il ne savait même pas où il se rendait, il avait déjà perdu toute notion du temps. Mais voilà qu’il décida, surement machinalement de rentrer dans ce bar qui avait tout d’effrayant tant il lui rappelait les projecteurs. La scène l’appelait continuellement il la voyait partout. C’était pour cela que mains dans les poches, il jouait avec son médiator, afin de s’occuper. Rentrant dans le bar en poussant la porte d’une main mouillée sur la buée de la vitre, il s’engouffra dans le bar dont les néons l’aveuglèrent légèrement tant le contraste entre l’extérieur et le bar était flagrant. Marchant en direction dur bar, il s’arrêta net soudainement lorsqu’il reconnu une des personnes assise sur une banquette : Eileen. Eileen et Neel avaient vécu beaucoup de choses ensemble, et tout s’était arrêté du jour au lendemain, à cause de la mort de Leeroy. Neel ne lui avait pas présenté ses condoléances, elles n’auraient pas été sincères, et du jour au lendemain, tout avait changé. Ils ne se comportaient plus comme des amis, mais comme des rivaux. L’incompréhension était totale chez l’Ecossais. D’ailleurs puisqu’elle était là, il allait en profiter pour comprendre. S’approchant d’elle, il prit la parole : « Tu attends quelqu’un Laurens ? » D’un ton froid, caractérisé par le nom de la jeune femme plutôt que son prénom. Elle avait décidé de rendre les choses complexes, il allait aller dans son sens, plutôt que de chercher à montrer qu’il était déçu de son attitude.

Neel Lincoln était présent. Eileen n'avait pas besoin de lever la tête de son chocolat chaud pour savoir que c'était lui qui venait de parler. Elle reconnaitrait sa voix entre mille. Un timbre grave, légèrement cassé. Mais suave. Et puis, il y a de là quelques semaines, elle passait des heures entières à parler avec lui... Mais la vie change. Les gens aussi. Tranchant. Il l'avait même appelée par son nom de famille. Ça en devenait blessant. C'était blessant, que disait-elle... Parce qu'elle ne comprenait pas ce qui avait pu autant les éloigner. Et que tout n'était pas que de sa faute, mais aussi de celle de Neel, quoi qu'il dise, quoi qu'il pense. Elle serra les dents afin de ne pas fondre de nouveau en larmes. Surtout pas devant lui. Elle ne souhaitait en aucun cas qu'il soit sarcastique à son égard en la voyant pour une fois faible. Et qu'il en profite. Elle avait un peu de mal à reconnaître le Neel qu'elle avait connu lorsqu'il lui parlait d'une telle façon, cependant, elle ne doutait pas du fait qu'il soit encore présent. Elle le savait, du moins elle l'espérait secrètement. Intimidée. Le jeune homme lui faisait cet effet. Elle ne le regardait pas. Elle ne voulait pas croiser son regard, plein de haine certainement. Parce que ce n'était pas le moment. Qu'elle rêvait seulement d'oublier ses dernières semaines, qu'elle rêvait seulement que le passé refasse surface, plus beau que jamais. Et que ce présent s'en aille, à jamais. « Tu veux que j'attende qui ici Neel ? Tu sais autant que moi qu'à part toi, ici, il n'y a rien ni personne à voir... » De nature gentille, comme à son habitude, Eileen avait répondu calmement. Et puis, elle ne voulait pas être méchante avec lui.

Eileen releva enfin son regard vers le jeune homme. Il n'avait pas changé, si ce n'est que contrairement à elle, il avait l'air plus comblé qu'avant. La mine que Neel tira en voyant la tronche de Eileen lui fit comprendre qu'elle devait avoir une sale gueule. Et un coup d'œil dans le miroir un peu plus loin le lui confirma. Son maquillage avait passablement coulé, couvrant ses joues de longues coulées noirâtres. Elle devait faire quelque chose. « Euh ouais... Excuse moi, j'dois aller faire un tour aux toilettes» Et puis flûte. Il pouvait se moquer d'elle à souhait, être cruel autant qu'il le souhaitait. Un peu plus, un peu moins. Elle s'en remettrait. Elle laissa là son chocolat chaud et ses affaires, emportant simplement son sac. Une fois à l'intérieur des toilettes, pièce légèrement petite mais chaleureuses, elle attrapa un mouchoir et s'enleva l'intégralité de son maquillage, dévoilant ainsi des yeux trempes et rougis. Merde. De toute façon, ça commençait mal. Ça pouvait bien continuer, Eileen n'était plus à ça près. Elle rejoignit Neel et reprit place à l'endroit qu'elle occupait quelques instants plus tôt. Le jeune homme en face d'elle la mettait mal à l'aise, trop de choses la séparaient de lui, et elle en souffrait. Mais ne l'admettrait pas. Puisque lui avait l'air de s'en foutre royalement. Laurens l'avait-il appelée. Cruel. Douloureux. Un supplice venant de lui. Elle l'adorait autant qu'elle le haïssait, mais par dessus tout, au delà de tout ça, elle ne savait plus. Pourquoi. Et Comment. Comment tout cela avait-il pu autant changer. Et Comment lui faisait pour rester planté là, debout, alors que la réalité prenait tout son sens, peu à peu : La fatalité ne voulait pas d'eux en alliés. Et Eileen en eut la nausée.

Neel avait le sens de l’amitié. Daniel et lui étaient amis depuis tous jeunes, ils avaient tout vécu ensemble, ils avaient tout partagé, ils s’étaient entraidés, ils avaient tous deux vécus de sales moments, mais toujours ensemble. L’amitié pour le jeune Lincoln c’était ce qu’il y avait de plus beau, la loyauté entre amis n’avait pas de prix, et il était tout aussi loyal qu’il était guitariste, il ne tromperait jamais ses amis. Et pourtant, regardant ce visage meurtri par le maquillage qui avait coulé – l’effet de la pluie sans doute – un sentiment de culpabilité rempli son cœur. Que s’était-il passé entre Eileen et lui ? Rien. Il ne se souvenait de rien, de quoi que ce soit. Pourquoi leur amitié si forte soit elle, avait laissé place à ce sarcasme, cette ignorance qui pouvait parfois aller jusqu’à la haine ? Il se le demandait bien, lui qui était qualifié de tourmenté, c’était le cas. L’incompréhension régnait dans son esprit. A y penser, tout coïncidait avec la mort du batteur des Maniacs, mais Neel n’était pas Aidan, il n’avait pas tué Leeroy, et si son groupe marchait c’était surtout grâce à leurs qualités premières de musiciens, et non de la descente aux enfers des Maniacs. Les fans ne passaient pas d’un groupe à un autre. De plus les Fun Factory se voulaient musiciens et non commerciaux. Ils n’étaient au centre d’aucun scandale, et d’ailleurs ils ne cherchaient aucun problème. Mais par ailleurs, personne ne leur faisait de cadeau. Au contraire, les deux autres groupes rivaux leur donnaient tous les défauts du monde, leur reprochait leur ascension, qui pourtant tombait simplement au mauvais moment. Neel se défendait toujours en disant qu’il ne se préoccupait pas de ce qui arrivait aux autres, il faisait son bout de chemin, portant à bout de bras le groupe qui très uni, manquait tout de même un peu d’ambition, contrairement à son leader. Ce clivage entre groupes serait donc le point de départ de cette amitié perdue ? Eileen lui répondit calmement, ce qui quelque part le perturba. Oui, parce que le jeune homme pensait qu’elle ferait comme d’habitude, c'est-à-dire l’ignorer, à la différence près qu’aucun membre des Maniacs n’était ici. Alors il attrapa la chaise en face de la banquette où était assise Eileen, et il s’assit à son tour, bras croisés sur la table, demandant au serveur qui passait un café. Il répondit alors à Eileen, baissant la tête fixant ses mains qui jouaient avec son médiator, sorti un peu plus tôt de sa poche. « Je me disais que tu aurais pu trainer avec des membres de ton groupe. Je pensais être le seul à m’isoler. » Relevant la tête, il fixait Eileen du regard, comme à la recherche du passé.

Eileen avait l’air peinée, quelque chose n’allait pas, en plus de la pluie, les larmes s’y étaient mêlées, il en mettrait sa main à couper. Tandis qu’elle se leva peut être gênée de son état extérieur, sauf que si c’était justifié, elle n’avait pas à s’en faire, il était là pour l’aider si elle en avait besoin, mais peut être qu’une nouvelle fois, il y aurait des tensions, puisque malheureusement pour lui leurs rapports s’étaient dégradés et il n’était pas sur que ça aille en s’arrangeant. Alors qu’elle était allée aux toilettes, il se contenta de boire son café, en patientant gentiment. Il tentait de réfléchir, il avait envie de s’expliquer. Quand elle revint s’asseoir, il chercha à lui sourire, mais ça paraissait presque difficile. La regardant en coin, il soupira, avant de dire : « Eileen…Pourquoi on en est là ? J’ai beau chercher, je ne vois pas. » Il baissa de nouveau la tête. Les mots sortaient difficilement comme s’il voulait fuir, mais il avait décidé fixant son café, que ça allait changer.

[désolé sans internet c'est difficile de répondre plus vite! ]

« Je me disais que tu aurais pu trainer avec des membres de ton groupe. Je pensais être le seul à m’isoler. » Son groupe. Il savait autant qu'elle que ce lieu était le leur et qu'elle ne l'aurait jamais montré à quelqu'un d'autre. Pas même à Noah. Non. Trop de souvenirs leur appartenant se trouvaient là, jusqu'à leurs noms qu'ils avaient gravés sur le comptoir, à l'aide d'une clef, lors d'une soirée bien arrosée. Il était hors de question qu'elle passe un moment avec un autre que le leader des Fun Factory ici. Inconcevable. Impossible. Inimaginable. Et puis de toute façon, le mot groupe était désormais un bien grand mot. Ils n'avaient rien composé de nouveau depuis ce vingt aout et leur producteur attendait depuis près d'une semaine les maquettes du nouvel album, ce qui ne pouvait évidement pas se faire puisque aucune discussion n'était possible. Ils se rejoignaient aux heures habituelles -du moins quand ils venaient- mais ne jouaient pas, ne parlaient pas. Seule la batterie de Donovan, le petit nouveau résonnait. Seul l'instrument du cadavre continuait de jouer, comme un appel au secours. Oui, le groupe n'existait pratiquement plus. Tout comme sa relation avec Noah. Et celle avec Neel. Ainsi que celle avec Céleste, Donovan. Tout au final. Ou presque. Tout lui passait sous la main, tout partait en vrille. Même elle. Peut-être qu'au final, elle avait le droit de pleurer. Peut-être que tout cela était mérité, et que pour une fois, personne n'aurait le droit de lui reprocher d'être faible. « Le groupe... Si tu parles de ces cinq membres qui sont désormais des étrangers les uns des autres, qui ne savent même plus quoi se dire à part se hurler dessus.. Alors non, je ne suis pas avec eux. J'cherche pas non plus à m'isoler, je crois surtout que ces derniers temps, c'est l'isolement qui m'a choisie, Neel... », avait-elle dit la gorge serrée, retenant le plus longtemps ses mots qui racontaient la réalité. Mais mon dieu ce que cette réalité était dure, mon dieu ce qu'elle lui faisait mal. Bordel de chiottes.

Un tour aux toilettes pour revenir pas tellement mieux, au final. Mais elle faisait abstraction à tout ça. Elle parlait à Neel, pas à n'importe qui. Et il l'avait toujours acceptée telle quelle. Du moins, avant... Puisque aujourd'hui, leur relation n'était elle plus acceptable. Le destins s'évertuait à les séparer, à leur donner tant d'arguments pour qu'ils comprennent qu'eux, ce n'était pas possible, que eux, cette amitié si forte n'avait pas lieu d'être, et qu'aux yeux de la fatalité, elle n'avait jamais eu lieu d'être. Eileen souhaitait contourner ces règles, imposer ses choix, mais elle n'était plus la fille forte qu'ils avaient tous connue. Loin de là. « J'sais pas Neel, j'en sais rien, je te promets que j'trouve pas d'explications à tout ça... On était beaux ensemble, oh oui, et mon dieu ce que ça me plaisait de refaire le monde en ta compagnie... Tu sais Neel, quoi que tu puisses penser, j'aurais aimé que tu saches que j'voulais pas tout ça, et que oui, tu me manques... ». Putain. Oh oui il lui manquait. Elle s'en rendait compte parce que en face de lui, elle avait l'impression d'être face à un inconnu. Et que cet inconnu au visage révélateur lui rappelait des moments magiques. Est-ce qu'ils se haïssaient aujourd'hui ? Non. Mais leurs vies se haïssaient. Et comment arriver à tenir avec ce tel poids ? Hein...

[nuul à chier. En même temps j'ai posté pendant la mise à jour de Fa, donc obligé de refaiiire T-T]

Neel ne se retrouvait pas dans ce qu’elle disait à propos de son groupe à elle. Il avait beau être solitaire, leader et tout ce que vous voulez, Neel restait quelqu’un qui avait besoin des autres, même s’il se disait indépendant. Son groupe c’était un peu comme sa famille, et il savait qu’il pouvait compter sur eux, qu’ils ne le laisseraient jamais tomber. Daniel était son meilleur ami, Athenaïs sa…petite amie d’un soir particulière, et il appréciait même les disputes avec Holly car elles faisaient partie des meubles. Quant à Norah, elle le rassurait rien que par sa présence. Ils étaient très unis, et Neel ne s’imaginait pas vivre la mort de l’un deux, ou même un scandale pareil. La séparation du groupe serait trop dure à vivre pour lui, comme si on lui enlevait une partie de lui-même, car sur scène, ils ne faisaient qu’un.

S’ils ne faisaient qu’un, que faisait Neel seul – du moins ce qu’il faisait avant de retrouver Eileen ? Le jeune écossais était un des plus grands solitaires de la planète entière, surtout si quelque chose le contrariait. Et en l’occurrence depuis de longs mois quelque chose le tracassait, l’empêchait même de réfléchir. Il possédait une addiction, outre que l’alcool, bien plus tyrannique, bien plus difficile à gérer, à vivre, une obsession, une fille. Plus que ça, cette fille en question faisait partie de son groupe, et encore mieux, il couchait avec elle de temps à autres. Pourquoi au juste, pourquoi ne pouvait-il pas avoir plus ? La peur. Effrayé de lui avouer ce qu’il ressentait à l’égard de la jeune Olivers, de 7 ans sa cadette. Et puis ça lui paraissait ridicule à côté de leur amitié. Et en même temps inconcevable, rien qu’à voir Holly et Dan qui le répugnaient par leur amour rose et de leur bonheur.

Fixant la table, jouant avec son café, il soupira, ne sachant que dire, il se contenta d’un faible : « Ah… » Mais pensant qu’Eileen se vexerait trop facilement, il continua : « Remarque, si vous pouvez pas vivre sans lui, alors il est préférable d’arrêter. » Bien sur, il n’y avait rien de méchant, rien de calculé, puisqu’il continuerait à agir de la même façon comme si Leeroy n’était pas mort. En revanche, cela soutenait quelque chose…Qu’Eileen se détruirait s’ils restaient dans cette ambiance qui au lieu de créer des liens les défaisait. Elle pouvait prendre du repos, comme les autres, se remettre et reprendre leur activité s’ils le désiraient, en l’honneur du défunt batteur, ou autre motif. Mais le sujet qui l’intéressait n’était pas là. Il avait osé poser la question fatidique celle à laquelle elle fut incapable de répondre correctement, mais dont les mots le touchèrent. Alors rien n’avait changé en elle. Seulement leurs attitudes à eux par rapport à l’évènement. En même temps il était également responsable, puisque face à ce genre de choses, il avait fuit et avait approuvé ce comportement. Il ne savait actuellement plus quoi répondre. Que dire face à cette révélation ? Il gardait la tête baissée, il ne semblait plus rien comprendre, mais pourtant il restait à l’écoute. Il finit par briser ce silence qui le pesait étrangement : « Tu crois vraiment que j’ai profité de la défaillance de ton groupe pour que le mien perce ? » A présent il la regardait dans les yeux, il était sincère, et il voulait surtout comprendre. Retournement de situation, oui, mais tant de choses lui étaient encore étrangères.

[MDR c'est mauvais, je regarde un match de foot, je galère! ]

Le vide. Béant. Eileen n'était pas à sa place, assise sur cette banquette de bar, discutant avec Neel comme si cette discussion était une renaissance. Ce n'était pas faux, certes, mais les raisons qui les poussaient à se parler n'étaient pas les bonnes. Ils ne s'étaient pas proposés de se retrouver là, afin de discuter et de repartir comme avant. Ils ne se donnaient plus de nouvelles depuis plus d'un mois. Et là, elle se trouvait en face de lui, parlant du seul sujet qui les avait éloignés. Etrange. Ce qui se passait ici était inhabituel, un semblant de réconciliation qui n'avait peut-être plus lieu d'être... Parce qu'étrangers le destin voulait qu'ils soient. De plus, Eileen se sentait tiraillée. Parce qu'elle était partagée en deux, et que chaque parti la tirait d'un bout à l'autre, essayant de la rallier pleinement à leur cause. Il y avait d'un côté le groupe, et surtout Noah, son petit ami. Ses relations avec lui étaient plus que tumultueuses ces derniers temps, ils ne se voyaient pas & quand ils étaient ensemble, ils s'engueulaient... Et leurs vaines réconciliations, leurs vains espoirs ne duraient malheureusement que peu de temps. Puis il y avait les autres comme Neel ou bien Donovan. Elle savait que lorsque tout serait nir, Neel ne la lâcherait pas, parce qu'ils avaient tissé ensemble des liens forts, presque fusionnels. Leur relation. Propre à eux. Mais avaient-ils réellement le droit ? Droit de reprendre les choses en main, droit de défier cette foutue fatalité qui voyaient en eux d'autres projets. « Rah Neel, tais toi, t'as jamais été doué pour conseiller...» sourire mi figue / mi raisin... « Et puis il n'y a pas d'autres solutions que de continuer de jouer... On a Neel à honorer maintenant...»

« Tu crois vraiment que j’ai profité de la défaillance de ton groupe pour que le mien perce ? » Question cruelle. Douloureuse et directe. Que pouvait-elle bien répondre ? A côté de ça, le silence top pesant qui avait fait acte de présence quelques minutes auparavant lui manquait presque. Oui elle le pensait. Mais lorsqu'elle voyait le visage nostalgique de Neel, lorsqu'elle comprenait que son regard lui criait "Tu me manques", elle ne savait plus quoi penser. Et surtout, elle ne voulait se résoudre à lui confirmer ce dont il se doutait déjà. « Mon Neel... Oui, j'ai du mal à concevoir autre chose je crois... Pourtant tu savais que je te souhaitais tout le bonheur du monde, que j'aurais donné énormément pour que toi aussi tu deviennes un jour célèbre. Tu te souviens, on avait passé une soirée allongés sur l'herbe dehors, et on avait parlé du moment où tu accèderais toi aussi à tous ces strass... On en avait rêvé hein, tellement rêvé... Mais je n'imaginais pas ta montée sur les marches de c'te façon... Alors j'sais pas quoi en penser. Parce que t'aurais pu venir me voir, je sais pas, j'avais besoin de toi... Puis tu as la gloire, et moi c'est le déclin complet. C'est pas ce qu'on avait prévu ensemble, et je hais le destin. » Une larme. Légère mais tout de même. Son discours ridicule venait d'aboutir sur ça. Et elle se sentait conne, conne de ne pas assumer complètement qu'elle s'était peut-être trompée sur Neel et sa montée au sommet. Conne de ne pas aller au bout d'elle-même, de ne pas s'énerver et tout frapper. Conne. Elle essuya timidement le fruit de sa tristesse, espérant que Neel n'ait rien remarqué. Puis elle attendit. Le silence absorbait la salle, lui donnant une allure funèbre et lugubre. Neel, il faut que tu parles... J'veux pas fondre en larmes, pas ici, ni devant toi...

Neel commençait à comprendre. Les choses en étaient arrivées là sur une incompréhension totale, un quiproquo dont on invente plus le sens. Ca ne leur ressemblait pas pourtant, mais le jeune Lincoln avait le sentiment que c’était du déjà-vu. Son père avait vécu les mêmes choses. Autrefois, quand il était au sommet, on lui reprochait sa gloire, et tout le monde le laissa tomber, dans son groupe au départ, puis dans ses amis également. La maison qui avait toujours été pleine, s’était soudainement vidée de tout son air, inutile, trop grande pour quatre personnes, puisque Neel avait été élevé par sa gouvernante. Il avait le sentiment net que cette guerre de groupes les achèveraient tous, ils ressembleraient alors à cette maison des Lincoln, qui n’était plus que l’ombre d’elle-même. Neel se sentait comme non concerné par tout ça dans le fond. Pour lui, les choses s’étaient envenimées mais il n’y était pour rien. Il ne se battrait jamais inutilement comme ça. Cette querelle débile l’avait foutu dans une merde infâme, mais il s’en sortait pas trop mal finalement, son groupe marchait, mais il devait faire face aux mêmes critiques qui le rendait profiteur de la situation. Ce n’était pas comme s’il démarrait dans la musique, ça faisait déjà pas mal de temps qu’en Ecosse ils cartonnaient. Mais non, il fallait leur faire payer le prix de la mort de Leeroy. Très bien. Tout ça lui inspirait une chanson. Pour une fois. A croire que la présence d’Eileen lui était prolifique voire indispensable. Neel avait trouvé une personne sur qui compter en dehors de Daniel et ce n’était évidemment pas donné à tout le monde, car l’écossais accordait difficilement sa confiance. Eileen bien que faisant partie d’un groupe rival, avait toujours été là pour lui, et ça il en tiendrait compte éternellement. Ce qui l’empêchait d’ailleurs d’oublier leurs bons moments, et de vouloir absolument retourner dans le passé. Neel se sentait à présent comme gêné. Oui, il venait de vexer la jeune Laurens qui s’attendait certainement à tout sauf à ça, mais malgré tout il continua dans ce sens : « Vous allez devenir commerciaux. Si y a pas d’osmose dans un groupe, c’est nul. Faites des carrières solo. Et puis Leeroy n’a pas été très honorant en se battant stupidement. Je suis désolé de te dire tout ça, tu veux certainement pas l’entendre, mais il n’était pas obligé… » Mais allez savoir pourquoi, Neel revint une énième fois sur ses paroles, il savait qu’il la blessait, et il n’en avait aucunement envie. « Excuse moi Eileen…J’aurais pas du. »

Sentant que l’ambiance était tout de même légèrement froide, il chercha à détourner l’attention en chantonnant légèrement. Mais chaque fois que son regard croisait celui de la jeune femme, il avait envie de lui dire tant de choses, mais pourtant les mots ne sortaient pas. Elle brisa ce malaise qui s’installait, mais ce fut à son tour de le vexer. Alors elle pensait réellement qu’il avait profité de la situation. Baissant les yeux, il rit nerveusement. Il s’y attendait c’est vrai, mais il aurait préféré ne pas l’entendre… « Tu crois vraiment que je suis capable de ça ? On a percé en Ecosse que vous étiez au sommet, et on ne s’est jamais plaint, on a continué notre route sans se préoccuper de qui que ce soit, mais quand on a débarqué en Angleterre, on est arrivé au mauvais moment, et tout le monde nous a mis la mort de votre batteur sur le dos, mais qu’est ce qu’on en savait nous ? Je lis les journaux comme tout le monde, mais on allait pas s’arrêter pour vous faire plaisir. Et crois-moi, si tu avais eu besoin de moi, tu serais venue me voir. Ce que tu n’as pas fait. Tu t’es enfermée dans ton malheur, et tu as cru à tout ce qu’on a raconté. Ce n’est pas le destin Eileen, c’est toi qui le fait ton propre destin. Si tu veux vraiment que tout redevienne comme avant, il n’y a que toi qui peux le faire. » Neel ne savait pas comment la rassurer, il était moralement à bout d’endurer tout ça, il voulait que tout aille bien, mais ce n’était pas le cas. Il tenta une approche, en prenant Eileen dans ses bras.

[Désolé de l'énorme retard! ]

Tais toi Neel. Sérieusement la ferme. Tu dis n'importe quoi là. T'as pas le droit de juger ainsi la tournure que prend le groupe, pas le droit de me faire subir tout ça. J'ai pas voulu qu'on en arrive là, j'étais bien moi, quand Leeroy était encore là. Rien ne clochait. Alors arrête toi là. Tais toi, tu t'enfonces et tu m'enfonces certainement encore plus. Et Dieu sait à quel point je n'ai pas besoin de tout ça, pas maintenant, pas ici. Les mots ne sortaient cependant pas. 'était fou, il y avait deux mondes entre son intérieur & l'extérieur. Entre ses pensées et ce qu'elle laissait entendre. Et tout ça la dérangeait. Elle aurait dû jouer comme lui, entrer dans un sujet fâcheux, presque trop douloureux, lui montrer qu'il n'était pas là pour la juger, qu'il n'avait pas ce droit. Mais elle ne le pouvait pas. C'était aller contre sa nature, contre sa façon d'être. Et s'il y avait bien une chose qu'elle pouvait encore faire, c'était rester soi même. Et encore, elle le faisait mal. Elle se laissait aller, de toute évidence, tout partait en couille, et peu de choses avaient encore de l'importance à ses yeux, si ce n'était Noah, son groupe frivole & ses rares amis tels que Neel ou Preston. Mais elle avait énormément de mal à avancer, à continuer sans trop se retourner, et ces quelques personnes n'y changeaient pas grand chose, si ce n'est rien. Elle l'écoutait sans broncher, ses mots la blessaient mais elle faisait semblant de rester de marbre, bien qu'elle n'eût jamais été une grande comédienne. Au contraire. Et puis merde. De toute façon, elle ne tiendrait plus bien longtemps dans cet état incertain. Oui, Leeroy s'était battu avec ce mec, et oui c'était de sa faute. Mais qui ne s'était jamais battu ? Souhaitait-il qu'elle lui rappelle ce qui s'était passé au dernier grand rendez-vous musical ? Souhaitait-il qu'elle lui remette les idées au clair ? N'avait-il pas failli en venir aux mains avec Liam & Aidan ? Si. Alors il n'était pas en droit de venir parler. Puis de toute façon, elle savait déjà tout ça.

Il s'excusa & elle osa un instant le regarder dans les yeux, simplement histoire de voir s'il était entrain de l'entourlouper ou s'il y avait une once de sincérité dans ses dires. Mais elle devenait parano. Elle n'était pas en face d'un monstre, mais de Neel. Et s'il y avait bien une personne sincère avec elle, c'était lui. Les liens qui les unissaient étaient si forts qu'elle arrivait encore à croire en eux, même si tout n'était pas rose. Surtout en ce moment. Puis comme si ce rare moment n'avait été que l'ébauche d'une vie, une bulle éclatée, Neel s'énerva de nouveau, pointant ses paroles vers les accusations de notre Belle. Elle ne devait pas fléchir, mais elle se rendait compte, avec une effroyable sensation, que depuis le début de la fin du monde, depuis ce foutu cauchemar bien encré dans la réalité, tout n'était que du vent. Et qu'elle cherchait des problèmes là où, peut-être, il n'y en avait guère. Et si Neel & son groupe était juste et malheureusement arrivé au mauvais moment, comme lui vaquait à le dire. Alors sans un mot, sans aucune autre explication, elle sentit toutes ces certitudes s'évaporer en un instant, pour ne laisser place qu'au doute. Elle foirait tout. Autant que Noah, bien qu'elle le fasse elle de façon subtile. Mais comme chacun des membres du groupe, elle faisait n'importe quoi. Elle qui s'était toujours considérée à l'abri de leur état se retrouvais désormais bien niaise. « Oh Neel... Tu as sans doute raison... Je ne sais pas. Je ne sais plus. C'est fou. J'suis perdue, rien ne va... J'aurais aimé que tu viennes, bien que je ne sois pas venue te voir... Mais j'aurais aimé. Et j'sais pas ce que vaut le destin, si c'est moi qui le construis ou non, ce que je sais c'est que... Je sais rien en fait. Simplement, j'aurais aimé que tu sois là, avant, pas ce soir, pas par hasard, avant. »

Son corps fut vite serré contre celui de Neel, et elle n'eut le courage de se détacher. Une larme, puis deux. Tout n'était que vent, paroles en l'air. Il était là, tout de suite, et elle devait en profiter. On ne sait jamais ce qui peut arriver, lui avait-on dit.

[Nul.]