Together, only together {Eileen&Donovan}

Un mercredi après-midi. Comme tous les mercredis après-midis. Les journées d’Eileen se ressemblaient désormais toutes, ne changeant que très peu d’une semaine sur l’autre, ce qui avait don de la mettre dans tous ses états. Tout était trop monotone. Tout. Jusqu’aux interviews auxquelles elle répondait depuis ce fameux vingt Aout. Des questions toujours semblables, des réponses toujours troubles. Des disputes avec Noah. Des disputes avec le groupe. Des soirées à regarder là télé. Des soirées à se demander quoi faire. Tout était monotone, bien trop lent, bien trop superficiel. Et rien ne lui donnait envie de sortir de sa léthargie quasi-constante. Rien. Strictement rien. Elle aurait aimé avoir une vie un peu plus attrayante, surtout ces derniers temps. Non. Je ne parle pas de piquant, de feu aux poudres ou de tout évènement de ce genre. De ce côté, Eileen et bien d’autres étaient servis. La mort de Leeroy avait amené une note bien salée à l’histoire de Londres. Mais surtout à celle des Maniacs. Un des cinq s’en était allé, laissant derrière lui un vide immense et impossible à combler, bien qu’elle eût essayé plusieurs fois. Leeroy était un confident, un ami et un grand frère. Et le perdre avait eut l’effet d’un coup de poignard. Profond. Douloureux. Renversant. Rien ne serait plus pareil. Et tout serait différent. Parce que tout était impossible à oublier, impossible à surmonter. Ouais, encore une de ces journées à gambader un peu partout, un peu nulle part. Voilà le quotidien d’Eileen, pianiste chez les Maniacs, et âme errante à ses heures perdues.

Une simple robe lui donnant un air de fille de campagne et une paire de converses délavées et légèrement trouées, les cheveux remontés en une queue de cheval foireuse : Eileen s’apprêtait à sortir de chez elle. Elle avait pris l’habitude de ne plus faire tout un plat des photographes l’attendant de pied ferme devant chez elle, photographes désirant juste un cliché d’elle et de Noah se disputant. Elle sortait et venait, les ignorant, et espérant qu’ils finiraient par s’en lasser. Souhait qui pour le moment ne s’exauçait guère. Foutu souhait, dirons-nous. Les clés en poche, ou plutôt en sac, Eileen descendit vivement les marches qui la séparait de l’extérieur : de la vie. Dans la rue, les gens grouillaient donnant presque une image de fourmilière. Ca se bousculait dans tous les sens, ça se marchait sur les pieds sans s’excuser, ça se croyait surtout tout permis. Et Dieu sait ce que notre jolie rousse détestait ça. « Vous comptez vous excuser ? Non évidement. Et après, on ose venir me dire que les célébrités prennent la grosse tête, laissez-moi rire » s’emporta-t-elle. C’est les poings serrés qu’elle continua sa route, essayant de se frayer un foutu chemin à travers la foule en ébullition. Etait-ce un jour spécial ? Une grande date qu’Eileen aurait oubliée ? Non, pas qu’elle ne s’en souvienne. Déambulant dans les rues pleines, marchant au hasard, ne se posant aucune question –ou alors des questions sans intérêt- Eileen atterrit finalement dans un parc. Vide. Ou presque. Elle laissa un long sourire de soulagement s’échapper et se mêler à l’air qui l’entourait, et trouvant un coin d’ombre, elle laissa son corps ne faire qu’un avec le sol. L’herbe fraîche, encore un peu humide. La nature, l’insouciance. Voilà ce qu’Eileen aimait. Au plus profond d’elle, elle se voyait gambader dans des champs, se rouler dans les herbes et manger du gibier à s’en faire péter l’estomac. Répugnant, dîtes-vous ? Point de vue. Les lais des arbres, la mousse et les rayons traversant les feuillages : Eileen se sentait bien, presque trop reposée. Le lustre du lieu n’en était que plus admirable puisqu’il donnait une beauté surnaturelle au paysage. La belle était séduite.

Un crayon, un bout de papier. Ecrire. Essayer de composer un petit quelque chose. Son esprit envoûté, son imagination aux aguets, les mots fusaient, se bousculant presque afin d’atterrir les premiers sur le support. Elle ne se relisait, elle laissa simplement aller son cœur où bon lui semblait. De toute évidence, il n’allait pas bien loin, puisque ses mots se répercutaient sur une atmosphère nostalgique : L’absence. Une présence ? Etait-ce bien une présence qu’Eileen sentait au dessus de ses épaules, au dessus de ses mains se baladant sur le fin papier, au dessus de sa tête. Oui, il y avait une silhouette, silhouette qui en passant, faisait de l’ombre au soleil. « Et si tu t’installais avec moi, au lieu de rester planté là, à cacher le soleil et à lire mes pensées posées sur un papier ? » Dit-elle souriant. Elle avait presque oublié le fait qu’elle l’eût ignoré lors de la répétition, vis-à-vis de ses camarades qui ne s’étaient toujours pas fait à sa présence. Elle non plus –du moins pas complètement- mais elle commençait peu à peu à l’apprécier. Une petite grimace, elle espérait simplement qu’il ne lui en veuille pas trop. Elle était dans une situation délicate, il fallait l’admettre.

[Pas le temps de relire, le corrige les fautes demain.. Désolée pour la qualité de l'écrit et les fautes donc XD]

« Tu sais, tu peux le dire si je te déranges. À te voir l’air cet après-midi, j’étais certain que tu allais me donner la raclée de ma vie si je t’adressais un seul mot. Je sais pas moi, t’es peut-être juste pas d’humeur aujourd’hui et le seul moyen que t’as trouvé pour me le faire savoir c’est de faire comme si j’existais pas. » A peine posé près d’elle que les réflexions fusaient déjà en direction de notre rouquine. Ouch. Il lui lançait un petit piquant. Bien mérité. Eileen avait espéré qu’il ne fasse aucune remarque par rapport à son comportement lors de la répétition quelques heures plus tard. Mais non. Il avait fallu qu’il parle, qu’il lui reproche ce changement d’attitude brutal. Inadmissible. Presque cruel. Non. Eileen avait été cruelle. Mais elle ne le faisait guère exprès. Seule avec lui, elle arrivait à tout mettre de côté, à oublier sa provenance et sa partance. Elle arrivait à tout balayer pour profiter de quelques instants de discussions intéressantes, de grands mots philosophiques, de contradictions poignantes… Et ce en compagnie du jeune homme. Et seulement lui. Eileen ne saurait dire quel talent avait le garçon, pourtant, il arrivait à la faire évader de la dure réalité de temps en temps, lui apportant même de bons moments, presque trop bons. Parce que toute bonne chose a une fin. Et le retour au chemin quotidien se faisait chaque jour un peu plus dur. Féroce. Douloureux. C’était se dire qu’elle allait contre les souhaits de Noah, qu’elle parlait à l’homme que tous ses amis voulaient voir disparaître, et c’était se sentir de longues heures durant coupable. Mais de quoi ? De ne pas suivre le groupe et de trouver en Donovan un espoir. L’espoir d’une source d’inspiration. L’espoir d’une remontée vers le succès. L’espoir d’une vie ensoleillée et lumineuse. L’espoir de s’en sortir, simplement. Et l’idée que ce soit Donovan qui l’aide à remonter la pente et non Noah ou un autre membre du groupe lui donnait la nausée. Et lui rappelait à quel point elle se sentait délaissée ces derniers temps. Chacun se laissait sombrer chaque jour un peu plus, ne laissant que moins de corde de secours à celui qui passerait derrière pour les soutenir. Et elle, elle avait cette impression étrange de combattre seule le désespoir. Cette impression livide et nomade, puisqu’elle fuyait pour revenir, puis pour s’abandonner de nouveau de son corps frêle. Cette impression qui lui dictait que, au final, on n’était jamais mieux servi que par soi-même. « J'suis désolée... J'sais juste pas comment me placer par rapport au reste du groupe.. J'voudrais pas qu'ils pensent que, enfin voilà... Surtout pas Noah. Leeroy était comme un frère, et il aurait l'impression que je pactise avec le diable... »

Eileen était bel et bien en tort, il fallait l’admettre. A quoi était dû son comportement si… inhumain ? Elle n’arrivait pas à le savoir avec exactitude elle-même. La réponse à cette question, à ce problème, n’était pas limpide. Elle était floue, presque trop transparente pour la qualifier de réponse. Son comportement vis-à-vis du jeune homme était en partie à cause du reste du groupe, mais l’excuse était-elle valable ? Certainement pas. Médiocre et irréaliste. Stupide et sans valeur. Eileen le savait pertinemment. Elle devait pourtant trouver quelque chose à répondre mais son cerveau refusait de se mettre en ébullition. Pourquoi devenait-elle tant odieuse lorsqu’elle n’était plus seule avec ? Peut-être parce qu’il y avait Noah et les autres membres du groupe. Elle ne voulait pas qu’ils pensent tous à l’unanimité que la mort de Leeroy ne lui faisait strictement rien et qu’il avait suffi d’un peu plus d’un mois pour que le chagrin s’évanouisse, d’un peu plus d’un mois pour qu’elle se fasse à la présence de Donovan. Tout ceci était faux. Bien sûr que Leeroy lui manquait, bien sûr qu’elle pleurait en pensant à lui, et bien sûr que le groupe des cinq laissait une douleur pesante. Mais parallèlement, Donovan était un être à part entière au sein du groupe désormais, et il fallait admettre que sans lui, le groupe n’aurait pu continuer à exister. Au final, qu’ils veulent l’avouer ou non : C’est Donovan qui faisait perdurer le groupe. Et qui plus est, il était le seul à apporter un peu de joie dans son sac lors des répétitions. Chose qui ne pouvait pas faire de mal. Ca non. « J'ai pas envie qu'tu refuses de me parler à cause de mon comportement puéril... Ta position n'est pas facile non plus... Je vais faire de mon mieux pour que tu te fasses accepter.. Du moins j'essayerai...»

Elle releva le menton et le regard, regard qui était resté figé sur l'herbe fraîche tout au long de son discours sans intérêt. Elle se mordit légèrement la lèvre, signe incontournable qui montrait qu'elle avait peur de la réaction de Donovan. Puis, balayant les alentours d'un regard absent, certainement terne, et laissa son dos aller contre le sol, lui donnant une vue imprenable sur les nuages. Pureté. Ce fut le mot qui lui vint le premier à l'esprit en s'allongeant, prenant une position familiale plus, beaucoup plus confortable. Idéale dans un tel lieu. Elle tourna la tête vers Donovan, attendant qu'il daigne lui répondre. Peut-être que finalement, elle appréciait -un peu- le beau jeune homme, et que leur relation lui faisait du bien. Peut-être. Certainement. A coup sûr. Chez notre belle, tout était trop sûr. Chaque évènement, chaque sensation était prévue, telle une horloge mécanique. Un mécanisme monotone et sans fin. Un tic-tac rigoureux, tellement rigoureux qu'il en devenait emmerdant. Lassant. C'était ça désormais la vie d'Eileen. Des gestes répétés. Une vie emmerdante. Et Donovan, lui et ses humeurs, lui et ses grands mots. Donovan était l'échappatoire. L'ami qu'il faut avoir. Le confident de circonstance. Et le pantin des Maniacs, malheureusement. Pendu à un contrat, pendu à un chemin tracé. Au sein d'un groupe qui n'observait même pas les efforts qu'il s'évertuait à faire chaque jour.

[Bof >< Mais pas vraiment le temps d'essayer d'améliorer.. Désolée :(]

« T’as jamais pensé à être toi, à la place d’être comme les autres ? » Eileen stoppa net. Avait-il vraiment prononcé ces quelques mots alors qu'elle venait de s'excuser ? Non. Eileen ne pouvait le croire. Elle n'arrivait pas à imaginer que ces quelques mots soient réellement sortis de la bouche de Donovan. Pourquoi ? Parce qu'il n'avait pas le droit. Personne n'avait le droit de la juger ainsi, de lui sortir des mots aussi secs et violents. Personne. Surtout lui. Parce qu'il ne la connaissait pas. Il ne savait rien d'elle -ou pas grand chose-. Eileen regretta aussitôt de s'être excusée et d'avoir essayé de trouver un bon fond en lui. Les mots du jeune homme tournaient en rond dans sa tête, lui grillant peu à peu les tympans et lui donnant la nausée. La jeune fille détourna le regard et le planta vers un arbre quelques mètres plus loin. Que pouvait-elle bien répondre à cela ? Rien. Parce qu'aucun mot ne pourrait exprimer ce qu'elle voulait lui dire, lui faire comprendre. Peut-être avait-elle eu tort de penser que leurs discussions en valaient la peine. Et que Donovan était leur espoir. Oppressée. Désorientée. Eileen ne se sentait plus à sa place, assise ici à côté de lui. Elle ne voulait pas entendre plus de propos aussi sauvages de sa part. Mais pourquoi était-elle autant touchée ? Parce qu'il avait su toucher un point sensible de la jeune fille, une carapace n'ayant jamais été fracturée. Un trésor inavoué puisque introuvable. « Tu ne sais rien de moi. Ni toi, ni les autres. C'est facile de juger. Mais vous ne savez pas. J'suis moi. j'veux juste pas leur faire de mal. Tu peux pas comprendre. Tu veux pas surtout. Vous me saoulez. Tous. Arrêtez de m'envoyer des mots blessants à la gueule. J'suis peut-être pas moi. En même temps j'sais plus qui je suis. Le groupe ne vaut plus rien, Noah m'laisse pour ses bouteilles d'alcool et Céleste pleure la mort de Leeroy à temps plein. Alors ouais, excuse-moi d'pas être moi. » Elle ne le regardait toujours pas. Elle essayait seulement de ravaler ses larmes. Tout allait de travers. Et on venait lui demander d'être soi-même. Ridicule et comique. Humour noir. Là tout de suite, elle aurait aimé être avec Leeroy. Parce que lui avait su la comprendre.

« C'est pas si simple figure-toi. Leeroy ne méritait pas de mourir comme ça. Et t'es pas à notre place, tu ne peux pas savoir. Il était jeune et avait toute la vie devant lui. C'était un gars bien. Puis c'est avec lui que le groupe a commencé. Pendant plus de trois ans on a répété ensemble chaque jour. Pendant trois ans... J'ai même pas eu le temps de lui dire au revoir. J'ai pas voulu aller dans sa chambre alors que tout le monde y était. J'lui ai pas dit au revoir. Il doit me détester. Mais j'pouvais pas. j'voulais pas croire que c'était réellement la fin. Que mon meilleur ami allait crever sur un lit d'hôpital alors que la vraie vie débutait à peine. J'y arrive pas sans lui. Et ne viens pas me dire que j'fais pas d'efforts. Contrairement au reste du groupe, j'me bats moi. J'souris aux gens, je sors, je fais ce qu'on me demande de faire. Et j'ferme ma gueule. De toute façon ça n'a plus d'intérêt. Y'a qu'avec lui que les débats avaient un sens. Parce qu'il avait une façon de penser si particulière qui faisait qu'on l'aimait tous. Et j'suis là à vanter ses mérites alors que j'ai même pas été capable d'le voir partir. Que j'étais pas là. Et qu'au final, t'as bien raison : Faut qu'on s'en remette, et moi, j'suis plus capable d'être moi-même. j'suis le groupe, j'm'y rattache parce qu'il n'y a plus que ça. » Reprendre sa respiration. Eileen inhala longuement, essayant ainsi d'empêcher d'innombrables larmes de passer la foutue barrière de ses yeux. Ne pas pleurer en public. C'était son dicton. Sa croyance. C'était la seule chose qu'elle maîtrisait à peu près. Ravaler son foutu chagrin de merde qui était apparu à cause de ce connard de Aidan.

Bien-sûr qu'il n'était plus en maternelle. Elle le savait. Elle avait simplement voulu l'aider. Le comprendre. Le sauver. Mais il l'avait refusé. Puis de toute manière, les mots qu'il lui avait balancée l'avaient bien refroidie. Elle se battait corps et âme pour se sortir de cet enfer, pour oublier la mort de Leeroy et avancer enfin sans lui. « T'as raison. T'es plus à la maternelle. Tu t'en sortiras aussi bien seul »

[pfiou, c'est nuuuuuuuuuuuuuuuul. Ce week je ferai un truc bien, là il est tard et j'suis morte >< Encore désolée. j'suis une insatisfaite XD]

Trop. Il y en avait trop. Trop de mots de la part de Donovan. Il en disait beaucoup trop. Eileen n'avait jamais parlé autant depuis la mort de Leeroy. Elle n'avait jamais autant déblatéré de mots à ce sujet. Parce que ce sujet faisait mal. A chaque fois qu'un mot sortait de sa bouche, un nouveau crissement se faisait entendre en son intérieur, lui conseillant sévèrement de s'arrêter là. Mais les mots se vidaient d'eux mêmes, trouvant refuge dans l'air frais. C'était une sensation étrange, qui aurait pu être enivrante si elle n'avait pas porté sur la mort de son camarade. Mais elle portait sur lui. Et puis c'était ainsi depuis ce fameux vingt aout désormais. Tout était en rapport avec lui, avec c'te date, avec cet évènement. La souffrance à l'état pur. Mais elle devait réagir. Pour tout le monde. Et surtout pour Leeroy. Peut-être qu'il fallait qu'elle expose ses sentiments autant qu'elle le pouvait. Peut-être fallait-il qu'elle en parle jusqu'à n'en plus pouvoir, jusqu'à ce que les larmes l'empêchent de parler et de respirer. Jusqu'à ce que tout sorte. Enfin. Mais pas ici, pas devant Donovan qui s'évertuait à lui balancer des propos blessants depuis le début de la conversation. Elle retenait donc ses foutues larmes tant bien que mal. On pouvait cependant avouer qu'elle était quelque peu douée à ce jeu là, qu'elle pouvait tenir pas mal de temps avec une dose d'eau coincée dans son corps, dose d'eau qui ferait exploser tout son petit corps frêle au moindre dérapage trop violent. Mais elle avait tout de même une ténacité de fer, et aujourd'hui, elle avait décidé qu'elle ne laisserait pas Donovan la faire pleurer et ravaler sa fierté. Non, elle ravalerait seulement une chose : ses larmes. Coûte que Coûte. Du moins, c'est ce qu'elle espérait au plus profond.

« Ouais, ça doit pas être simple. Comprends juste que c'est pas facile pour nous de ne plus voir Leeroy assis sur ce tabouret. Ça faisait plus de trois ans qu'il était avec nous. Et puis merde... J'te dois pas d'explications. Tu me rabâches ce que je sais déjà... T'as le don pour savoir y aller en douceur toi. » Ironie. Bien entendu. Il la mettait carrément mal à l'aise. Elle n'avait pas l'habitude de recevoir autant de paroles dures. Puisqu'elle n'en disait pas elle-même. Mais là, tout partait en vrille. Elle n'avait pas regardé le jeune homme depuis les premiers pics qu'il lui avait lancée à la gueule. Et elle ne comptait pas le regarder pour le moment. Tout ne tenait plus qu'à un fil. Et son regard aggraverait seulement la situation. Elle devait se montrer forte. C'était sa devise à elle, toujours montrer aux autres que l'on est forte, que l'on va bien. Son combat. Son chemin. « J'suis contre la vengeance. Tout se paye un jour, ou du moins moi j'y crois. Et je sais que Leeroy n'aurait pas aimé ça. Ce mec était le plus clean, le plus juste qu'il m'ait été donné de rencontrée. Il n'aurait pas voulu ça. Oui le groupe d'Aidan s'en sort certainement mieux que le notre, mais nous, on peut au moins avoir la satisfaction de se dire que l'on a pas été obligé de buter quelqu'un pour arriver à cette gloire éphémère. » Brut et net. Elle avait été claire. Eileen se foutait de toute cette gloire, de ces paillettes et du fait qu'Aidan les ait devancés. Eileen et son groupe n'avait pas perdu le respect en cours de route. Ni l'humilité. Et tout le monde ne pouvait pas en dire autant. Elle se sentait au moins bien à ce sujet là. Et au fond d'elle, elle savait qu'Aidan paierait un jour ou l'autre. Mais la vengeance ne servait à rien. La justice frapperait au moment où personne ne s'y attendrait, et l'effet n'en serait que plus redoutable. Plus envieux. Plus douloureux. Elle ne voulait en aucun cas qu'un des membres de son groupe aille casser la figure de ce salaud parce qu'aucun d'eux n'était à l'abri d'un nouveau coup fatal. Non, il était bel et bien hors de question qu'un autre des siens crève pour l'honneur de Leeroy.

Il venait de s'asseoir en face d'elle, non loin cependant. Seuls quelques centimètres carrés d'herbe les séparaient l'un de l'autre. L'espace ne suffisait pas. Eileen avait besoin de respirer plus amplement, de ne pas trembler pour ne pas pleurer. Or il lui faisait peur. Parce qu'il n'avait aucun scrupule et qu'il n'hésiterait pas à lui balancer toutes les insanités possibles. Elle avait du mal à le cerner, à savoir qu'il il était vraiment, ce qu'il valait. Ce garçon au caractère flou, à l'humeur changeante lui donnait une sérieuse envie de s'y tenir à l'écart. Elle savait pertinemment qu'elle avait été la fautive en l'ignorant à la répétition, mais elle aurait aimé qu'il essaye de la comprendre au lieu de lui balancer tout et n'importe quoi au visage. Bordel. Et il redevenait agréable, gentil et calme. Mais pour combien de temps ? Eileen restait désormais sur ses gardes et ne le regardait toujours pas. L'herbe et les passants étaient passionnants. C'est ce qu'elle essayait de faire croire afin de ne pas être obligée de le regarder. Le blanc des yeux. Crise de sanglots assurée.« J'reste pas là à pleurer. Tu me vois pleurer ? Est-ce que tu me vois ne pas sourire dehors, à part maintenant ? M'as-tu déjà vu hurler à la mort ? Non. C'est pas à moi que tu dois dire ça, mais aux autres. Et c'est pas non plus sur moi que tu dois vider ton putain de sac avec des mots peu glorieux. J'y suis pour rien si t'as pas eu de chance de tomber sur le groupe des Maniacs pour débuter ta carrière. Non. J'y suis pour rien... Alors au lieu de me faire la morale, regarde autour de toi trente secondes le mal que tu viens de causer, et poses-toi les bonnes questions. »

Eileen avait de plus en plus de mal à se contenir. Les jointures de ses mains se faisaient plus pâles, presque blanches. Elle n'était pas énervée. Ou si. Mais l'énervement avait laissé depuis longtemps place à la tristesse. Et cette réalité effarante la blessait autant qu'elle la rassurait. Parce que si on voyait les choses avec un minimum de recul et d'impartialité, Eileen se rendait compte que Donovan était une des seules personnes à être franche avec elle ces derniers temps, et qu'il la poussait ainsi à aller au bout de soi même. Ce qui ne pouvait évidement pas lui faire de mal. Cependant, parallèlement, les paroles de son compagnon était trop brutales, trop franches, trop directes. Elle aurait certainement préféré qu'il y aille plus en douceur, faisant ainsi preuve d'une maturité plus soutenue. Mais ce n'était pas le cas. Et les paroles de son interlocuteur la frustraient, résonnaient continuellement dans sa tête lui donnant un mal de crâne insoutenable. Elle était perdue au milieu d'un labyrinthe sans sortie, elle se demandait juste où foutre les pieds pour ne pas s'enfoncer un peu plus. Mais rien n'y faisait. Il la subjuguait. La violence de ses propos, la conviction qu'il donnait à chacun de ses mots l'effrayaient. Car elle ne pouvait faire face à tant d'assurance. C'était certain : Ils ne jouaient pas dans la même cour. Elle ne pouvait se résoudre à continuer dans cette élan, à sortir de nouvelles complaintes sans intérêt puisque de toute évidence, il trouverait une nouvelle fois quelque chose de trop dur à lui répondre. Donovan et son franc parlé. Donovan et son langage cru. Trop cru. Il arrivait à faire mal, à blesser avec des mots. Qu'il choisissait avec soin. Grand soin. Méticuleusement. Eileen ne savait jouer à ce jeu là, et quoi qu'il dise, il savait autant qu'elle qu'elle n'avait jamais été méchante avec lui. Maladroite parfois. Mais jamais elle n'avait été lui dire qu'il ne pouvait faire parti du groupe, ou bien qu'il ne valait rien. Jamais.

« Que ce soit toi ou un autre, ça changera rien. Et dis moi, est-ce que j'ai une seule fois remis ta place dans le groupe en question ? Non. J'ai jamais dit que tu ne méritais pas de jouer avec nous ou que tu valais moins que Leeroy. Jamais. Alors ne viens pas me reprocher n'importe quoi, s'il te plait. » Tchak. Elle n'était pas passé par quatre chemins. Mais elle lui avait simplement rappelé la vérité. Il la confondait un peu trop avec le reste du groupe, ce qui était plus que paradoxale puisqu'il lui demandait en même temps d'être elle. Comment pouvait-elle se montrer elle-même alors que lui la mettait dans un bocal, celui des Maniacs. Elle n'avait cependant plus les mots pour exprimer tout ça, pour le lui expliquer. Car il était hors de question qu'elle entre dans son jeu et emploie des mots brutaux. Hors de question. Donovan devait s'arrêter là. C'était Leeroy qui était mort, et ses questions n'avaient donc aucun sens. Qu'est-ce que ça apporterait de savoir ce qu'ils auraient fait si c'était Noah, Amber ou bien encore elle qui était mort ? Rien. Ça n'apporterait rien. Aidan avait buté Leeroy et personne d'autre. Et aucune explication n'était rationnelle et juste face à la mort. Aucune, pas même celle digne d'un grand homme, d'un grand esprit, d'une grande âme. Donovan devait se la fermer, il entrait sur un terrain dangereux, parce que s'il en disait ne serait-ce qu'une goutte de trop, il aurait droit aux larmes dévastatrices de Eileen. Et qui souhaitait réellement voir pleurer cette bouille d'ange ? « Tu dis n'importe quoi. Arrête de te permettre d'être plus pointu. C'est Leeroy qui est mort et pas un autre, alors non je cherche pas à savoir si lui aurait été tuer Aidan ou non, s'il serait resté pacifique jusqu'au bout ou s'il aurait tout laissé tomber. Tu peux pas savoir comment il aurait réagi. Personne ne sait comment vont réagir les autres face à une telle situation. »

Une larme pointa le bout de son nez, sauvage et espiègle. Elle avait su se saisir d'une négligence de sa propriétaire pour parcourir sa joue, dessinant un petit filet humide et lumineux. Translucide. Eileen l'essuya rageusement et bien rapidement, d'un revers de main. Rester forte. Coûte que coûte. Eileen se répéta cela plusieurs fois comme lorsque l'on écrit des lignes. Elle ne devait pas flancher. Mais en même temps, comment résister lorsqu'on parlait sans tabou de la mort de son meilleur ami ? Comment ne pas fondre quand les mots de votre camarade vous brûlaient cruellement la gorge en vous consumant les entrailles ? Comment faire... Une autre larme parle, et Eileen l'essuya tout aussi vite que précédemment. Et pour la première fois depuis longtemps, elle affronta son regard, espérant ainsi qu'il comprenne ce qu'elle pensait de lui à ce moment précis et surtout, qu'il voie bien dans quel état il venait de la foutre. « T'y es pour rien. Et tais toi. Parce que je ne t'ai rien reproché & j'ai pas dit que tout ceci était de ta faute. Tu comprends tout de travers, t'es trop borné & tu veux seulement avoir raison. Alors j'vais te satisfaire : J'suis pas moi-même, le groupe sombre parce qu'on est tous trop cons pour se relever en à peine un mois. Et toi t'es notre souffre-douleur. Alors, ça apporte quoi de se sentir soutenu dans ses propos ? Donovan, je te rejette pas. J'admire même ta force, mais j'arrive pas à comprendre pourquoi tu cherches tant à trouver des explications à tout, à te justifier. Tu sais très bien que tu n'y es pour rien. Et personne ne te reproche ça. Ils ne le font pas exprès. Mais toi par contre, avec tes mots... » Elle détourna la tête... Elle ne pouvait le regarder. Il avait détruit son image de fille forte, sa forteresse était rompue.

[Boarf, désolée pour la qualité. Mais il est 00h32, et je suis pire que morte. Surtout que je me lève à 05h15 Bonne soirée ]